Province Manitoba

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Population 1267003 habitants

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Manitoba

Article par

T.R. Weir

Mis à jour par

Nathan Coschi, Leanna Fong and Erin James-Abra

Date de publication en ligne

le 8 août 2012

Dernière modification

le 4 novembre 2021

Le Manitoba est une province canadienne située au centre du pays, délimitée à l’ouest par la Saskatchewan, par la baie d’Hudson et l’Ontario à l’est, par le Nunavut au nord et par le Dakota du Nord et le Minnesota au sud. La province est fondée sur une partie des territoires traditionnels des Cris, des Anichinabés, des Oji-Cris, des Dakotas/Lakotas (Sioux) et des Dénés, ainsi que des terres de la nation métisse. La propriété terrienne est toujours régie par les traités numéro 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 10. Selon le recensement de 2016, le Manitoba compte 1 278 365 habitants, ce qui en fait le cinquième territoire ou province le plus populeux du Canada. Le Manitoba se joint à la Confédération en 1870, et sa capitale, Winnipeg, est constituée en ville peu après, en 1873. La première ministre actuelle en est Heather Stefanson. Elle est à la tête d’un gouvernement progressiste-conservateur majoritaire.

Géographie

Les régions physiographiques de Manitoba

Les régions physiographiques de Manitoba

(Harrison Panabaker/L'Encyclopédie canadienne)

On retrouve au Manitoba trois des sept régions physiographiques du Canada. Ces trois régions sont : les basses-terres de la baie d’Hudson, le Bouclier canadien et les plaines Intérieures. La majorité de la population du Manitoba est concentrée dans le sud-ouest de la province, dans la région physiographique des plaines Intérieures. C’est également dans cette région que se trouve la majorité des terres arables du Manitoba. Par contre, les basses-terres de la baie d’Hudson et le Bouclier canadien ne sont généralement pas propices à l’agriculture. Churchill, le seul port d’eau salée de la province se trouve dans les basses-terres de la baie d’Hudson. Les centrales hydroélectriques, la pêche en eau douce, les mines de métaux et le secteur sylvicole sont situés dans la région du Bouclier canadien.

L’eau douce est la principale ressource du Manitoba. Avec ses 101 590 km2 de lacs et de rivières (le sixième de sa superficie totale), Manitoba est la troisième province la plus riche en eau des dix provinces canadiennes. Parmi ses plus importants lacs, mentionnons les lacs Winnipeg (24 387 km2), Winnipegosis (5 374 km2) et Manitoba (4 624 km2). Ce sont trois vestiges du lac Agassiz. En outre, de nombreuses grandes rivières de l’Ouest canadien se jettent dans le sud du Manitoba, notamment les rivières Saskatchewan, Rouge, Assiniboine et Winnipeg.

Pour ce qui est de la végétation, le sud du Manitoba comprend des prairies. Les prairies se transforment en forêts mixtes vers le centre de la province. Le nord comprend des forêts boréales, et près de la baie d’Hudson, de la toundra. (Voir aussi La géographie du Manitoba.)

Histoire

Autochtones

Territoires traditionnels des Assiniboines, des Cris, des Dénés et des Ojibwés.
(avec la permission de Native Land Digital / Native-Land.ca)

L’actuelle province du Manitoba se trouve sur le territoire traditionnel des peuples assiniboine et dakota, qui vivaient dans les plaines du sud, de la nation crie, qui couvrait un vaste territoire s’étendant des plaines jusqu’aux basses terres de la baie d’Hudson au nord, et des Dénés, qui habitaient dans le Grand Nord. Les ancêtres de ces peuples autochtones seraient arrivés au Manitoba entre 10 000 et 13 000 av. J.-C. Les Anishinaabeg (voir Ojibwés), qui représentent l’un des principaux peuples autochtones du Manitoba avec les Cris, sont arrivés beaucoup plus tard; ils se sont installés au Manitoba il y a environ 300 ans.

Avant l’arrivée des Européens, les Autochtones du Manitoba vivent surtout de la chasse (orignal, caribou, ours et castor) et d’un peu de pêche. Ceux qui vivent dans les basses terres de la baie d’Hudson chassent également la sauvagine (comme l’oie), tandis que ceux des plaines comptent plutôt sur le bison pour la nourriture, les vêtements, les maisons et les outils. Des archéologues ont découvert au Manitoba des articles faits à partir de cuivre, d’argile, de roches et d’ossements, ce qui indique que les Autochtones participaient déjà à des réseaux d’échange et de traite à longue distance, pouvant aller jusqu’au côte du Pacifique dans l’Ouest ou encore jusqu’au golfe du Mexique dans le Sud, et ce, même avant l’arrivée des Européens.

Exploration : les années 1600 aux années 1700

L’exploration européenne du Manitoba n’a pas commencé dans le sud de la province, mais bien dans la région la plus froide et la plus éloignée : les rives de la baie d’Hudson. Au début du 17e siècle, nombre de navigateurs, dont Thomas Button (1612), Jens Eriksen Munk (1619-1620), et Luke Fox et Thomas James (1631), ont sillonné le littoral pour y trouver le passage du Nord-Ouest.

L’expansion du commerce des fourrures vers l’ouest engendre de plus en plus d’explorations au Manitoba. Deux explorateurs canadiens-français, Médard Chouart Des Groseilliers et Pierre-Esprit Radisson, intéressés par la traite des fourrures, persuadent le roi Charles II d’Angleterre de fonder la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) en 1670 et de l’établir sur un immense territoire (dont une partie constitue le Manitoba d’aujourd’hui) appelé Terre de Rupert.

Des postes de traite sont mis en place le long des rives de la baie d’Hudson : Fort Hayes en 1682 (remplacé par Fort York en 1648) et Fort Churchill en 1717-1718 (remplacé par Fort Prince-de-Galles en 1731). Dans les années 1690 à 1692, un employé de la CBH, Henry Kelsey, explore le sud-ouest en traversant les Prairies jusqu’à la rivière Saskatchewan. Quelque temps après, la famille La Vérendrye explore l’ouest en passant par les Grands Lacs et construit le Fort Maurepas (1734), sur la rivière Rouge, et quatre autres postes sur le territoire actuel du Manitoba. Par la suite, des commerçants indépendants envahissent les terres accordées à la CBH, ce qui suscite dans le milieu de la traite des fourrures une grande concurrence qui ne prend fin qu’en 1821, avec la fusion de la CBH et de la Compagnie du Nord-Ouest. Une vingtaine de forts ont été construits à différentes époques au sud du 54e degré de latitude nord, mais il reste très peu de vestiges permanents du passage des premiers explorateurs.

Cependant, l’arrivée du commerce des fourrures a un immense impact sur la vie des Autochtones au Manitoba. Leur participation à la traite change leurs coutumes sociales et économiques, sans parler de leur répartition territoriale. La possibilité de vendre des peaux en convainc beaucoup de chasser un nombre exagéré d’animaux, plutôt que de chasser seulement pour subvenir à leurs besoins. Avec l’introduction d’objets fabriqués en Europe, les Autochtones abandonnent leurs vêtements et outils traditionnels et deviennent dépendants du commerce des fourrures. Les Cris et les Anishinaabeg, qui s’en tenaient traditionnellement aux rives nord des lacs Huron et Supérieur, étendent tous deux leur territoire vers l’ouest à des fins de chasse, dans le but de conserver leur statut dans la traite. L’interaction qui en découle entre ces deux groupes résulte en la création d’une langue et d’une culture oji-cries hybrides.

Les relations entre les marchands européens et les Autochtones engendrent une autre culture bien connue : celle des Métis. Malgré que les mariages entre les colons et les femmes autochtones soient des coutumes dès les premières explorations européennes en Amérique du Nord, au début du 19e siècle, les Métis de la rivière Rouge forment une culture distincte, qui vient d’un mélange d’origines autochtone, française, anglaise et écossaise. Les Métis sont des chasseurs de bison hors pair. Ils prennent le rôle d’intermédiaire dans le commerce des fourrures, en fournissant par exemple du pemmican aux commerçants de la Compagnie du Nord-Ouest.

L’arrivée des Européens a également causé l’apparition de maladies comme la vérole, qui font un nombre désastreux de victimes au sein des populations autochtones. En 1781, une épidémie de vérole aurait condamné plus de 90 % des Autochtones dans la région de Churchill.

Colonisation européenne : les années 1800

Entre 1682 et 1812, la colonisation européenne au Manitoba se résume aux postes de traite de fourrure établis par la CBH, la Compagnie du Nord-Ouest et quelques marchants indépendants. La colonisation agricole commence en 1812, lorsque la CBH fournit à lord Selkirk une grande étendue de terre au croisement des rivières Rouge et Assiniboine afin de fonder une colonie pour réinstaller des fermiers écossais et irlandais. Pendant les 45 années qui suivent, la grêle, le gel, les inondations, les invasions de sauterelles, les escarmouches avec les représentants de la Compagnie du Nord-Ouest ou encore avec les Métis, en réponse aux tentatives des colons de restreindre la vente de pemmican et la chasse au bison, mettent à rude épreuve la colonie de la rivière Rouge, établie à Assiniboine.

D’autres colonies se sont établies ensuite à cause du monopole de la CBH et de la croyance selon laquelle la région n’est pas propice à l’agriculture. En 1857, le gouvernement britannique parraine une expédition pour évaluer le potentiel agricole de la Terre de Rupert, puis le gouvernement canadien, encouragé par un mouvement d’expansion dans le Haut-Canada, mandate Henry Youle Hind d’une mission semblable. Les découvertes de ces expéditions encouragent la colonisation plus au nord-ouest de la vallée de la rivière Rouge, où l’on découvre un croissant fertile pour l’agriculture.

Rébellion de la rivière Rouge : 1869-1870

Dans les années 1860, les gouvernements britannique et canadien souhaitent explorer l’ouest du continent et commencent les négociations avec la CBH en vue du transfert de la Terre de Rupert au gouvernement du Dominion. Les négociations font complètement fi des gens qui habitent le territoire, la plupart étant des Métis et des Autochtones. Les Métis, mécontents que leurs droits ne soient pas respectés, s’opposent à l’acquisition de leurs terres. En 1869, Louis Riel en tête, ils prennent d’assaut le Upper Fort Gary de la CBH et déclarent un nouveau gouvernement provisoire (voir Rébellion de la rivière Rouge). Après un long cul-de-sac, le gouvernement canadien abandonne. La Loi sur le Manitoba de 1870, qui transfère les Territoires du Nord-Ouest au Dominion du Canada et qui crée la province du Manitoba, garantit aux Métis les terres longeant les rivières Rouge et Assiniboine, en plus de 1,4 million d’acres pour leurs descendants. Malgré cette victoire évidente, Louis Riel et les autres chefs de la rébellion sont forcés à fuir aux États-Unis. Riel est exécuté en 1885 pour haute trahison. Puis, le gouvernement canadien ne tient pas les promesses qu’il a faites aux Métis; des vagues de colons arrivent de l’Ontario, les discriminent et s’installent sur leur territoire. De nombreux Métis insatisfaits s’installent plus à l’ouest pour conserver leur mode de vie, préparant le terrain pour un éventuel conflit (voir Résistance du Nord-Ouest).

Traités numérotés : 1871-1907

Traités nos 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 10.
(avec la permission de Native Land Digital / Native-Land.ca)

En 1871, le gouvernement canadien négocie également avec les Autochtones du nord-ouest dans le but de supprimer leur droit à des terres pour faciliter l’expansion de la colonisation vers l’ouest sans entraîner la violence qui afflige l’Ouest américain. Les traités qui en résultent sont connus comme les « traités numérotés ». Le Manitoba fait l’objet des traités 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 10, tous signés entre 1871 et 1907. L’histoire se répète : le gouvernement canadien s’avère encore une fois incapable de tenir ses promesses qu’il fait aux Autochtones pendant les négociations pour la signature des traités.

Expansion : la fin des années 1800 au début des années 1900

En 1870, le Manitoba se résume à la vallée de la rivière Rouge ; tout ce qui s’y ajoutera pour former l’actuelle province fait partie à l’époque des Territoires du Nord-Ouest, qui sont administrés par le gouvernement du Dominion. La colonisation de la nouvelle province se fait après l’étude des terres par le Dominion et la planification d’un chemin de fer national. Des terres, réparties en quarts de section, sont alors ouvertes à la colonisation avec la Loi sur les terres du Dominion, en 1872. (Voir aussi Le Manitoba et la Confédération.)

Il est bientôt évident que la minuscule province doit prendre de l’expansion. Les colons s’établissent en effet de plus en plus dans le nord-ouest et même au-delà des frontières établies. Entre 1876 et 1881, 40 000 immigrants, surtout des Ontariens d’origine britannique, s’installent dans l’ouest avec l’espoir d’y cultiver le blé à profit, grâce aux nouvelles machines agricoles et aux nouveaux procédés de mouture des grains. Des mennonites et des Islandais arrivent dans les années 1870, les premiers s’établissant autour de Steinbach et de Winkler et les deuxièmes, près de Gimli et d’Hecla. L’immigration ralentit ensuite jusque vers la fin du siècle, période pendant laquelle elle se limite surtout à de petits groupes d’Européens.

En 1881, après plusieurs années de conflit politique avec le gouvernement fédéral, les frontières sont redessinées : elles sont repoussées à l’ouest jusqu’à leurs limites actuelles, puis jusqu’à 53° de latitude nord et plus loin vers l’est. Ce n’est qu’en 1912, toutefois, que les frontières actuelles du Manitoba entrent en vigueur.

L’un des premiers colons ukrainiens, Semen Yanick, et sa femme Tatiana, entourés de leurs enfants à Oakburn, Manitoba, vers 1895.

L’un des premiers colons ukrainiens, Semen Yanick, et sa femme Tatiana, entourés de leurs enfants à Oakburn, Manitoba, vers 1895.

(avec la permission de Vladimir J. Kaye, Bibliothèque et Archives Canada/C-037531)

Entre 1897 et 1910, années de prospérité et de développement, des colons venant de l’est du Canada, d’Angleterre, des États-Unis et d’Europe orientale (surtout d’Ukraine) envahissent la province et les terres voisines. C’est la plus forte période d’immigration enregistrée au Manitoba. Les colons d’Europe de l’Est, auparavant considérés comme indésirables, sont dorénavant encouragés à immigrer par Clifford Sifton, le ministre de l’Intérieur de l’époque. Celui-ci est persuadé que les paysans de l’Europe de l’Est sont mieux préparés aux conditions hostiles de l’Ouest canadien que leurs compatriotes britanniques.

Développement : le début des années 1900 à la Deuxième Guerre mondiale

La rue Main à Winnipeg, au Manitoba, vers 1909.

La rue Main à Winnipeg, au Manitoba, vers 1909.

(avec la permission de William James Topley, Bibliothèque et Archives Canada/PA-009482)

De 1897 à 1910, le Manitoba connaît une prospérité sans précédent. Le coût du transport diminue, et le prix du blé augmente. La culture des céréales prédomine. Cependant, les fermes mixtes prospèrent et les éleveurs de bétail et les agriculteurs qui recherchent la qualité se font avantageusement connaître.

Winnipeg devient rapidement une métropole, comptant pour 50 % de l’accroissement de la population. Un centre d’affaires dynamique se développe dans la ville depuis l’intersection de Portage Avenue et de Main Street; de grands magasins, des sociétés de courtage et des compagnies d’assurance, des cabinets d’avocats et des banques s’y installent et prospèrent. Des abattoirs et des minoteries desservent directement les agriculteurs, tandis que le secteur des services, les ateliers de chemins de fer, les fonderies et les industries alimentaires prennent de l’expansion.

Le chemin de fer du Canadien Pacifique et le Canadian Northern Railway (plus tard la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada) établissent des gares de triage à Winnipeg, qui devient le centre d’un vaste réseau de chemins de fer allant dans toutes les directions. En 1906, on commence à produire de l’électricité à Pinawa, sur la rivière Winnipeg, et la création de la société Winnipeg Hydro, le 28 juin de la même année, garantit aux entreprises et aux particuliers un approvisionnement hydroélectrique à un coût modeste.

La crise économique de 1913 met fin à la prospérité. Le coût du transport augmente, le prix des terrains et du blé chute, et l’apport des capitaux étrangers tarit. L’ouverture du canal de Panama, en 1914, détrône Winnipeg au royaume du transport : les voies d’eau s’avérant plus économiques que les routes pour le transport des marchandises entre l’est et l’ouest.

Scène de rue lors de la grève générale de Winnipeg, en 1919.

Scène de rue lors de la grève générale de Winnipeg, en 1919.

(avec la permission des Bibliothèque et Archives Canada/PA-202201)

Pendant la Première Guerre mondiale, le recrutement, la fabrication de matériel de guerre et l’arrêt de l’immigration entraînent une hausse des salaires et des prix. Dès 1918, l’inflation semble incontrôlable et le chômage est élevé. Les salaires s’effondrent, les conditions de travail se détériorent, et de nouveaux mouvements radicaux font leur apparition chez les fermiers et les ouvriers urbains, entraînant la grève générale de Winnipeg en mai 1919. Le mécontentement des paysans est exprimé par le Parti progressiste, qui remporte 65 sièges (12 au Manitoba) aux élections fédérales de 1921 et qui remporte l’élection provinciale au Manitoba en 1922.

La Première Guerre mondiale est une période difficile pour les immigrants de l’Europe de l’Est qui sont arrivés au Canada dans les deux décennies la précédant, en particulier pour ceux qui viennent de l’empire austro-hongrois, contre lequel se bat le Canada. De nombreux immigrants considérés comme des ennemis sont emprisonnés ou internés, et ceux qui sont plus chanceux font face à de la discrimination quotidienne.

Pendant la Première Guerre mondiale, le 28 janvier 1916, le Manitoba devient la première province à octroyer le droit de vote aux femmes et à leur accorder le droit d’exercer des fonctions politiques au niveau provincial (voir Droit de vote des femmes). Parmi les membres éminentes du mouvement manitobain pour le droit de vote des femmes, on compte Margret Benedictsson, Nellie McClung, Ella Cora Hind, Francis Marion Beynon, Lillian Beynon Thomas et Amelia Yeomans (voir aussi Chronologie historique : Droit de vote des femmes dans l’Ouest).

Un essor industriel suit la dépression postguerre, vers la fin des années 1920. Jusqu’en 1928, la valeur de la production industrielle est supérieure à celle du milieu agricole, qui traverse une longue crise jusqu’en 1930, aggravé par la sécheresse, les insectes et les bas prix du blé sur les marchés mondiaux. La population, délaissant les fermes, migre de plus en plus vers les villes, où la situation n’est pourtant pas meilleure : l’industrie s’affaiblit et le chômage sévit.

Pour échapper au traditionnel cycle expansion-dépression, on s’efforce de diversifier l’économie, comme en témoigne l’expansion de l’industrie minière. Les exigences de la Deuxième Guerre mondiale rendent le Manitoba encore plus dépendant de l’agriculture et du secteur primaire, mais le boom d’après-guerre lui permet d’exploiter ses industries primaires et secondaires et de diversifier son économie.

Démographie

Population

Depuis 1961, la population du Manitoba augmente lentement, mais de façon stable, passant de 921 686 habitants en 1961 à 1 278 365 habitants en 2016. La population est répartie inégalement entre le nord et le sud. Bien que la région nordique, qui s’étend de la rive sud du lac Winnipegosis à l’ouest jusqu’à la rive sud du lac Winnipeg à l’est, représente plus de 79 % de la superficie de la province, elle n’accueille qu’un petit pourcentage de sa population. La colonisation du nord se limite aux postes de pêche isolés, aux villes minières, aux réserves des Premières Nations dispersées et au centre de transbordement de Churchill, situé loin au nord sur les rives de la baie d’Hudson.


Langues et origines ethniques

La majorité des habitants du Manitoba (74 %) identifient l’anglais comme leur langue maternelle, selon le Recensement de 2016. Les autres langues maternelles les plus parlées sont l’allemand (5.3 %), le tagalog (4.6 %), le français (3.7%), le punjabi (1.6 %), l’ukrainien (1.3 %) et le cri (1.2%).Selon le Recensement de 2016, environ 67 % de la population manitobaine est d’origine ethnique européenne. Parmi eux, ceux qui affirment une ascendance britannique forment le groupe le plus important; viennent ensuite ceux d’origines allemande, ukrainienne et française. Puis, depuis l’établissement de la colonie Nouvelle-Islande, sur les rives ouest du lac Winnipeg en 1875, le Manitoba compte aussi une population relativement importante de descendants islandais (environ 2.5 %). Environ 18 % de la population est d’origine autochtone (Premières Nations, Métis et un petit nombre d’Inuits). La province compte aussi bon nombre d’habitants d’origines philippinoise et sud-asiatique (6.4 % et 3.4 %, respectivement), qui demeurent principalement à Winnipeg.


Religions

La population du Manitoba est en majorité chrétienne, bien que plus d’un quart des habitants ne revendiquent aucune affiliation religieuse. L’Église catholique romaine est la plus grande congrégation religieuse de la province, suivie de l’Église unie du Canada et de l’Église anglicane. La province compte également de petites communautés de mennonites et des groupes catholiques ukrainiens, ou encore orthodoxes ukrainiens. Ceux qui pratiquent une religion non chrétienne représentent environ 5 % de la population.

Villes et réserves

Liste des dix plus grandes villes du Manitoba

Nom

Population

Winnipeg

705 244

Brandon

48 859

Steinbach

15 829

Thompson

13 678

Portage la Prairie

13 304

Winkler

12 591

Selkirk

10 278

Morden

8 668

Dauphin

8 457

Le Pas

5 369

Source : Statistique Canada, Recensement de 2016

Lorsque le Manitoba se joint à la Confédération, seulement 4 % de ses habitants résident dans des centres urbains. La population demeure principalement rurale jusqu’en 1951; selon le recensement de 2016, 73 % des habitants de la province vivent en milieu urbain.

La capitale provinciale, Winnipeg, est la plus grande ville du Manitoba. La grande région métropolitaine de Winnipeg compte plus de 61 % de la population de toute la province.

Lorsque le Canadien Pacifique (CP) décide d’enjamber la rivière Rouge à Winnipeg en 1881, la ville devient le carrefour de l’économie et du transport de l’Ouest canadien, et on la surnomme la « Chicago du nord » pendant ses années de prospérité, au tournant du 20siècle. Depuis la Deuxième Guerre mondiale, Winnipeg s’est peu développée. Elle demeure tout de même la capitale provinciale des arts, de l’éducation, du commerce, de la finance, des transports et du gouvernement.

Bien que la primauté de Winnipeg soit indiscutable, certains centres urbains occupent une position dominante dans le commerce local. Brandon, deuxième plus grande ville du Manitoba, est un centre de distribution et de fabrication pour le sud-ouest, tandis que Portage la Prairie, de dimension plus modeste, joue un rôle semblable dans l’une des régions agricoles les plus prospères de la province, celle des Plaines du Portage. Au nord, Thompson et Flin Flon sont avant tout des villes minières.

Les villes de Selkirk et de Dauphin et le village de Le Pas, autrefois des forts servant au commerce des fourrures, sont aujourd’hui des centres de distribution pour les collectivités avoisinantes. Bissett est quant à elle une petite ville minière du nord.

En tout, le Manitoba compte 376 réserves habitées par 63 Premières Nations. De plus, la Première Nation Animakee Wa Zhing, basée en Ontario, a une réserve qui chevauche la frontière entre l’Ontario et le Manitoba. En 2019, 162 787 Indiens inscrits vivent au Manitoba, et 58 % d’entre eux habitent dans des réserves. ( Voir aussi Réserves au Manitoba.)

(Données fournies par Affaires autochtones et du Nord Canada)

Il existe 307 réserves au Manitoba et 7 communautés des Premières Nations. Une réserve est une terre destinée exclusivement à un groupe des Premières Nations conformément à la Loi sur les Indiens tandis qu’une communauté est un endroit dont la population est majoritairement autochtone. En 2014, on dénombre 148 455 membres des Premières Nations au Manitoba; 59 % d’entre eux (soit 88 076 personnes) vivent dans des réserves. Le Manitoba présente la seconde plus importante population vivant dans des réserves au Canada après l’Ontario.


Avec juste un peu plus de 310 km2, la réserve de Wepuskow Ohnikaho, située au nord-ouest de la province, est la plus grande au Manitoba, et compte des membres de la bande Mathias Colomb, issue de la nation crie. À des fins de comparaison, citons que Winnipeg occupe juste un peu plus de 464 km2. La réserve de la Première Nation Peguis, située à environ 145 km au nord de Winnipeg, est la seconde plus importante en termes de superficie, suivie par Pachapesihk Wasahow, où vivent des membres de Mathias Colomb, de la réserve Crie Sapotaweyak, et de Split Lake, où vivent des membres de la nation Crie Tataskweyak.


Plus de la moitié des peuples des Premières Nations au Manitoba habitent des communautés accessibles seulement par des routes que le climat peut rendre impraticables, ce qui les isole, particulièrement durant l’hiver. De plus, en 2014, la qualité de vie dans les réserves du Canada est déclarée la plus faible au Canada, selon le rapport des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, un constat basé sur l’indice de développement humain des Nations Unies. Cette faible qualité de vie est visible à travers bon nombre de problèmes sociaux, tels que les conditions de logement indécentes ou la pauvreté généralisée. En 2016, par exemple, 25 % de toutes les demeures des réserves manitobaines ont besoin de réparations ou de remplacements. La même année, on constate que plus de 76 % des enfants habitant les réserves vivent dans la pauvreté, selon une étude menée par le Centre canadien de politiques alternatives.

Les graves problèmes qui accablent les réserves, tant au Manitoba que dans le reste du pays, sont les résultats directs de pratiques coloniales telles que les pensionnats indiens et les traités régissant la propriété territoriale, ainsi que d’un racisme systémique qui perdure encore aujourd’hui.

Économie

La chasse constitue la plus ancienne industrie du Manitoba, mais elle est aujourd’hui celle qui a le moins d’importance. Pendant 200 ans, le commerce des fourrures est le monopole de la Compagnie de la Baie d’Hudson, dans l’Ouest canadien jusqu’aux Rocheuses. Parallèlement à cette activité, la chasse au bison devient la principale source de revenus des plaines : les Premières Nations, les Métis et les voyageurs font le commerce de la viande, des peaux et du pemmican, devenu un aliment de base dans la région.

Jusqu’en 1875, la traite des fourrures est le principal secteur d’activité de Winnipeg, devenue une ville constituée de 5 000 habitants et le centre du commerce dans l’ouest. Le commerce de détail ou de gros et l’immobilier s’y développent, conséquences du nouveau mode de colonisation et du développement de l’agriculture. Le blé Red Fife remplace la peau de castor au titre de principal produit d’exportation.

À la suite du prolongement vers l’ouest de la principale ligne de chemin de fer du Canadien Pacifique, au cours des années 1880, les fermiers et les marchands de grains peuvent écouler leurs produits sur le marché international. Un flux d’échanges commerciaux est-ouest commence, et Winnipeg en devient le centre de transit. Au cours des décennies qui suivent, l’agriculture se diversifie pour inclure une grande variété de récoltes; au fil du temps, l’économie comprend elle aussi de plus en plus de nouveaux secteurs tels que les industries minières, forestières et manufacturières.

Agriculture

Vue aérienne des terres agricoles du Manitoba.

Vue aérienne des terres agricoles du Manitoba.

(© Travel Manitoba/Flickr, CC)

L’agriculture tient un rôle important dans l’économie de la province. Toutefois, sa contribution au PIB provincial varie de beaucoup d’année en année à cause de facteurs comme les récoltes et les fluctuations de prix, phénomènes sur lesquels les producteurs ont peu d’emprise.

Les variétés de céréales cultivées au Manitoba se sont énormément diversifiées depuis le début du 20e siècle, époque à laquelle on ne cultivait que le blé, l’avoine et l’orge, et le lin, le seigle, le pois sec et la pomme de terre. Aujourd’hui, on cultive au Manitoba des petites quantités de fruits, de champignons et de lentilles, mais ces récoltes ne constituent pas une contribution importante à la production agricole globale de la province. Malgré les conditions froides et arides, les récoltes ont doublé depuis les années 1960. Depuis les années 1970, lorsqu’on a découvert le canola à l’Université du Manitoba, les plantes oléagineuses comme le canola, le tournesol et le soya sont de plus en plus cultivées. Aujourd’hui, le canola, le blé, la fève de soya et la pomme de terre sont parmi les récoltes les plus importantes au Manitoba. Le porc est le bétail le plus élevé au Manitoba, qui est d’ailleurs l’une des premières provinces canadiennes en production porcine et son exportation. La province est également la troisième productrice de bœuf au Canada. Le Manitoba compte également plusieurs fermes laitières, de volaille et de moutons.

L’agriculture ne pourra probablement jamais se développer au-delà des limites qu’imposent la courte période de culture (moins de 90 jours sans gel) et les sols pauvres du Bouclier canadien. L’inondation périodique du cours supérieur de la rivière Rouge (au sud de Winnipeg) pose de sérieux problèmes aux agriculteurs, car elle endommage les infrastructures agricoles et les récoltes. Ces dernières années au Manitoba, tout comme dans le reste du Canada, la mode est aux très grandes fermes et au petit nombre d’entre elles.

Exploitation minière

Le Manitoba occupe le quatrième rang des provinces canadiennes en termes de production pétrolière brute. Des gisements de pétrole se trouvent au sud-ouest de la province et dans les basses terres de la baie d’Hudson. Durant la première décennie du 21e siècle, la production pétrolière gagne rapidement en importance au Manitoba avec une augmentation d’un peu plus de 200 %, passant de 621 378 m3 en 2000 à 1 873 445 m3 en 2010. Cette augmentation est accélérée par l’avènement des technologies de fracturation hydraulique.

Les métaux les plus exploités au Manitoba sont le zinc, le cobalt, le nickel, le cuivre, l’ or et l’argent. En 2014, le Manitoba extrait environ 24 % du zinc canadien, 12 % du nickel, et 100 % de la production nationale de césium, un ingrédient essential à la fabrication de produits électroniques, de piles et de moteurs d’avion.

Mine de Flon Flon, au Manitoba, en 1930.

Mine de Flon Flon, au Manitoba, en 1930.

(avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada/PA-015705)

Tous les métaux du Manitoba se trouvent dans le Bouclier canadien. Les mines les plus productives du Manitoba se concentrent à Thompson, qui est essentiellement l’unique producteur de nickel du Manitoba. La mine la plus ancienne, datant de 1930, se trouve à Flin Flon. Avec ses installations satellites de Snow Lake, cette mine produit une grande quantité de cuivre et de zinc, et de l’or et de l’argent en petites quantités. Les projets miniers en cours devraient poursuivre l’exploitation minière près de Flin Flon et Snow Lake jusqu’en 2030, un siècle après la création des premières mines dans la région.

Énergie

Manitoba Hydro, une société de la Couronne, est responsable de la production, de l’exploitation et de la distribution de l’électricité dans tout le Manitoba, en plus d’être le plus grand distributeur de gaz naturel à l’échelle provinciale. L’électricité produite par Manitoba Hydro provient principalement de 15 grandes centrales hydroélectriques sur les rivières Winnipeg, Saskatchewan et Burntwood, et sur le fleuve Nelson. Le reste (seulement 4 %) est généré par deux centrales thermiques au charbon et au gaz naturel, par quatre centrales au diesel ou par des parcs éoliens privés.

Auparavant, la production et la distribution de l’énergie au Manitoba sont d’abord entreprises par plusieurs petites entreprises et instances municipales. À l’époque de la Deuxième Guerre mondiale, celles-ci se sont regroupées et forment trois coalitions : la Winnipeg Electric Company, le City of Winnipeg Hydro Electric System et la Manitoba Power Commission. Souhaitant davantage de consolidation, le gouvernement du Manitoba met sur pied le Manitoba Hydro-Electric Board en 1949. En 1952, celui-ci achète la Winnipeg Electric Company, et en 1961, le gouvernement fusionne le Manitoba Hydro-Electric Board et la Manitoba Power Commission pour former Manitoba Hydro. Ce n’est qu’en 2002 que Winnipeg vend Winnipeg Hydro à Manitoba Hydro, qui regroupe aujourd’hui toutes les activités de production et de distribution d’énergie de la province.

Près du tiers des revenus de Manitoba Hydro proviennent de l’exportation de ses surplus d’électricité. La majorité des exportations se fait aux États-Unis, où la période de pointe en besoins d’électricité (l’été) correspond à la période creuse de consommation d’électricité au Manitoba. Les revenus ainsi générés permettent aux habitants du Manitoba de profiter de tarifs d’électricité parmi les plus bas en Amérique du Nord.

Exploitation forestière

L’industrie forestière est le cinquième secteur de production en importance au Manitoba. La région forestière dont le rendement est le plus élevé s’étend à partir du nord de la zone agricole.

Les espèces d’arbres commerciales les plus nombreuses sont, par ordre décroissant : l’épinette noire, le pin gris, le peuplier faux-tremble, l’épinette blanche, le peuplier baumier et le bouleau blanc. Viennent s’ajouter le sapin baumier, le mélèze, le cèdre, le chêne à gros glands, l’orme blanc, le frêne vert, l’érable du Manitoba, le pin rouge et le pin blanc.

Pêche

Deux pêcheurs du nord du Manitoba remplissent des caisses de poissons destinées au transport vers le sud, 1945.

Deux pêcheurs du nord du Manitoba remplissent des caisses de poissons destinées au transport vers le sud, 1945.

(photographie par by Jack Long, avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada)

La pêche commerciale existe depuis plus de 100 ans au Manitoba. L’eau recouvre 16 % de la superficie totale du Manitoba, et les pêcheurs professionnels en exploitent environ 57 000 km2. Le lac Manitoba et le lac Winnipeg, ce dernier étant l’hôte des plus importantes pêches commerciales de la province, sont responsables de la majorité de la production de poisson. Le poisson fraîchement pêché est acheminé vers des stations d’entreposage disséminées le long des lacs. De là, il est ensuite expédié à l’usine centrale de transformation de l’Office de commercialisation du poisson d’eau douce, située à Winnipeg, où est traité tout le poisson de la province destiné à être écoulé sur les divers marchés.

Parmi les 13 espèces commerciales, parées et transformées en fil